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La petite danseuse de 14 ans.

Dans un texte, aussi court que passionnant, Camille Laurens part avec empathie sur les traces de Marie van Goethem, qui fut le modèle de Degas.

Qui ne connaît pas cette sculpture en bronze faite par Degas, représentant une jeune danseuse en tutu, le menton levé et les bras étirés derrière le dos ? On peut l’admirer au musée d’Orsay.
En réalité, l’original était en cire, habillé de vrais vêtements et portant de vrais cheveux. Degas l’expose en 1881, au Salon des Indépendants, présenté dans une cage en verre. Malheureusement l’œuvre fit scandale, la petite danseuse fut jugée laide, à moitié idiote, voire criminelle. Degas la reprit et ne la montra plus. Après sa mort en 1917, vingt-deux moulages en bronze furent réalisés, dispersés dans des musées. Et l’original fut acheté par un Américain. Camille LAURENS a toujours été fascinée par cette œuvre et décide de faire des recherches sur le modèle.

Il s’agit de Marie Van Goethe, de parents belges très pauvres qui vivaient au pied de Montmartre. Elle était née en 1865 et était la cadette de trois sœurs. Comme ses sœurs elle doit rapporter de l’argent au foyer et sa mère, restée seule, la fait travailler à l’Opéra contre deux francs par jour(en 1870, c’est le prix d’un rat à manger). Mais cela ne suffit pas. Elle pose aussi pour Degas qui habite le quartier mais dans un bel appartement car lui est fils de banquier.

Donc la vie de Marie est très dure. Elle travaille dix ou douze heures par jour, six jours sur sept, comme la plupart des petits rats. Le foyer de l’Opéra est « un haut lieu de libertinage », beaucoup de filles ont un « protecteur » mais il semble que Marie et Degas n’aient pas ces liens-là. Degas a besoin de s’appuyer sur le motif et fait venir des filles chez lui.
Il connaît leur vie d’esclavage, il ne les idéalise pas, au contraire, il veut faire œuvre de dénonciation. Il veut déranger et montrer leur destin tragique. Dans ce domaine il rejoint Victor Hugo.
Quant à la petite danseuse, que pense-t-elle ? que révèle son attitude ? Les réponses ne sont que des suppositions. L’écrivaine n’a pas voulu écrire de fiction, n’a pas voulu tricher avec la réalité. Elle perd les traces de Marie et pense qu’elle est repartie en Belgique avec une de ses sœurs et qu’elle est morte seule dans le malheur comme Degas.
Camille LAURENS a fourni un très gros travail pour son enquête, avec des résultats qu’on peut juger décevants. Mais en se plongeant dans les archives, elle retrouve des traces de sa famille et fait des rapprochements entre son arrière-grand-mère et Marie. Et on prend plaisir à suivre toutes ces pistes qui font revivre une époque en décrivant une partie de la société. Petit livre court mais instructif et facile à lire, même s’il constitue l’un des volets du doctorat de l’auteur.

Commentaire par MALU

Elle est célèbre dans le monde entier mais combien connaissent son nom ? On peut admirer sa silhouette à Paris, New York ou Copenhague, mais où est sa tombe ? On ne sait que son âge, quatorze ans, et le travail qu’elle faisait, car c’était déjà un travail, à cet âge où nos enfants vont à l’école. Dans les années 1880, elle dansait comme petit rat à l’Opéra de Paris ; mais comme elle était pauvre et que son labeur ne suffisait pas à la nourrir, elle ni sa famille, elle posait aussi pour des peintres ou des sculpteurs. Parmi eux, il y avait Edgar Degas.   Résumé du livre, ETF
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